Clément et Montel sont de nouveau réunis pour une BD onirique et cauchemardesque, aux notes fantastiques, mêlant robinsonnade, quête initiatique et récit cathartique. Chroniques de l’île perdue est un voyage au cœur des peurs enfantines et des relations fraternelles, dans lequel règne la peur et l’effroi.
Sacha et Charlie, deux jeunes frères, font une croisière avec leurs parents quand soudain leur bateau sombre. Tous deux échouent sur deux rivages distincts d’une île mystérieuse. L’île semble être vivante et maléfique, se nourrissant des frayeurs et des angoisses des naufragés. L’environnement, à la fois effrayant et étrangement familier, les rapproche et les éloigne tour à tour. Pour se retrouver, ils vont devoir parcourir un long chemin, tant physique que mental.

Loïc Clément construit un récit à plusieurs niveaux de lecture, à l’instar d’un conte. Robinsonnade au premier abord, cet album dévoile une seconde lecture plus sombre. L’auteur aborde avec force la thématique des peurs enfantines, mais surtout les liens fraternels, complexes et parfois traumatisants. Le schéma narratif adopté - deux lieux distincts sur une même aire géographique - symbolise la proximité des frères mais aussi l’éloignement de leur caractère et de leurs ressentis. L’auteur met également en lumière toutes ces petites humiliations qui peuvent paraître anodines mais sont autant de blessures pour celui qui en fait l’objet, forgeant et accentuant toutes les peurs enfantines.
Anne Montel crée un univers angoissant et cauchemardesque aussi empreint de douceur (factice ?) et de tendresse. Elle parvient à sublimer et à personnifier mais aussi à adoucir les peurs enfantines qui peuplent l’imaginaire des deux héros. L’univers qu’elle propose est paradoxalement à la fois accueillant et terriblement terrifiant et offre là encore un deuxième niveau de lecture.
Audacieux, intelligent et anxiogène, cet album met tous nos sens en éveil même si parfois son sens peut nous échapper. On ne referme pas les Chroniques de l’île perdue indemne !