Le nouveau chef-d’œuvre d’introspection de JeanLouis Tripp. Longtemps resté enfant unique, JeanLouis reçoit dans ses premières années l’affection exclusive de son jeune père. Mais avec la naissance de ses frère et sœur, cet âge d’or se termine, et ses parents se déchirent bientôt en d’incessants conflits. Ce climat de tension, qui exacerbe le désir d’indépendance du fils aîné, va influencer ses choix de vie. Dans cette nouvelle introspection, JeanLouis Tripp tente de comprendre le fossé qui s’est peu à peu creusé entre son paternel et lui, malgré l’affection profonde qui les relie à jamais.

Un père

Éditeur : Casterman
Scénario : Jean-Louis TrippDessin : Jean-Louis Tripp
Prix : 28.00€
- ZOO
5.0
Scénario
5.0
Dessin
4.5
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Le synopsis de l'album Un père
Good trip sur un père

L’auteur met toutes ses tripes dans ce récit, nous faisant voyager dans la France des années 60 et même au-delà du rideau de fer, pour partager avec nous toute la richesse et parfois l’aridité que lui a apporté sa relation avec son père. Une personnalité marquante. Une histoire forte.
Après nous avoir partagé sans fard sa vie sexuelle dans Extases puis l'histoire de son frère Gilles décédé dans Le petit frère, Jean-Louis Tripp consacre cette fois un album à son père. Exploiterait-il le filon jusqu'au trognon ? pourrait légitimement se demander le quidam. À la lecture, on se dit simplement : c'est fichtrement bien foutu. La première page donne la tonalité. On est immédiatement accroché.
Un père haut en couleur traité en noir et blanc
Déjà le dessin. Tripp n'oublie pas la forme même si le fond reste la clé. Chaque case est fignolée, rendant avec force l'ambiance de sa jeunesse dans le Sud-Ouest des années 60 comme les années qui suivirent. Le noir et blanc volontiers charbonneux donne un grain de vieux film amateur qui nous immerge dans le récit. Seuls certaines cases ou certains détails (un papillon, une petite voiture, un emballage cadeau…) sont mis en couleurs. Pour le reste, la matière est restituée par un lavis légèrement teinté de brun. Le parfum du souvenir.

Longtemps resté enfant unique, JeanLouis reçoit dans ses premières années l’affection exclusive de son jeune père © Un père - Casterman
Mais surtout, Tripp raconte sans complaisance ni voyeurisme un père tel qu'il en existait alors : instituteur communiste engagé, bricoleur de talent pour compenser les budgets insuffisants. Mais aussi un homme qui aime les femmes, et pas seulement la sienne. Un père avec ses qualités et ses défauts. Un portrait terriblement attachant.
Des regards qui apportent du relief
L'auteur se met bien sûr en scène, y compris dans ses caprices, tel celui à propos du vélo qu'il obtint à Noël, bien loin de celui de ses rêves. À propos de rêves, celui, récurrent, de tuer le père est saisissant. Tripp ne se montre pas forcément à son avantage et c'est bien ainsi.
Les échanges que Tripp a avec sa mère âgée ou avec son frère Dominique permettent d’apporter un autre regard sur les souvenirs qu’il a de son père. Même si le petit Jean-Louis est devenu un homme de 65 ans qui a forcément pris du recul, ces éclairages complémentaires l’aident à mieux le comprendre ainsi qu’à mieux analyser les relations privilégiées entre un père et son aîné. Il peut nous faire réfléchir au traitement différencié, souvent de manière involontaire, de la relation que l’on a avec ses enfants.
Un père est surtout une formidable histoire, emplie d’humanité. Lisez-le. Vous aurez envie de le relire par la suite.
Article publié dans le mag ZOO n°104 Mai-Juin 2025
