Calle Málaga

Saïd fuit un méfait qu’il a commis, mais il se fuit aussi lui-même, sous le soleil d’hiver du sud de l’Espagne. Le silence est omniprésent. Sa solitude est bientôt rompue par des silhouettes inquiétantes la nuit et par un petit prof avenant qui va l’initier à des plaisirs simples. Une fable tout en contrastes.

Après l'excellent Tananarive, Mark Eacersall traite à nouveau la routine, la solitude, mais aussi l’amitié, le rêve d’une autre vie. Sous le prisme du récit de truand en cavale. La méfiance devient une seconde nature, l’esprit n’est jamais au repos. C’est le prix à payer…

La côte espagnole hors saison, cela peut être très calme. La lumière du soleil est toujours présente, mais les rues sont désertes. Cela arrange bien Saïd, qui a fui la France. Il n’a visiblement pas de problèmes d'argent mais il s'ennuie, même s’il fait tous les jours son jogging, joue aux jeux vidéo et fréquente ponctuellement une jeune prostituée qui semble tenir à lui. Mais Saïd, lui, reste froid et distant. Il se méfie. D’autant plus qu’il a l’impression d’être surveillé. Quelle est donc cette ombre qui semble le guetter devant son hôtel ?

Calle Malaga : La côte espagnole hors saison, cela peut être très calme ou pas... © James Blondel aux éditions Grand Angle

Sous le soleil exactement, ou sous les étoiles ?

Toutefois, l’amitié est au rendez-vous car Saïd va faire la connaissance de son voisin d'hôtel, un autre Français. Ce petit mec rondouillard et jovial, prof de biologie, est à l’opposé de lui. Saïd va découvrir les plaisirs de randonner dans la sierra en compagnie de ce spécialiste des plantes, de discuter en regardant les étoiles. Des petites joies simples. Saïd est en train de découvrir de nouvelles émotions que permet l'amitié, lui dont les seules relations humaines étaient la tendresse tarifée. Il commence à ouvrir sa coquille et parle même de son père. Mais son passé pourrait bien le rattraper...

James Blondel a participé à différents albums collectifs chez Petit à Petit. Calle Málaga est la première bande dessinée dont il est seul responsable au dessin. Son trait est efficace et sans fioritures. Peut-être parfois encore un peu raide sur les personnages, mais l'ambiance est là. Il joue beaucoup sur les contrastes, les jeux de lumière, les ombres. Parfait pour un polar sous le soleil de Málaga, rasant en hiver. Parfait également pour les nombreuses séquences nocturnes.

La rédemption est-elle possible pour Saïd ou est-il simplement en sursis ? On peut deviner l’issue. En tout cas, ce petit polar sympa et contemplatif vous apportera une réponse.

Article publié dans le Mag ZOO N°102 Janvier-Février 2025