La poursuite du bonheur

Vous n’allez pas lâcher l’histoire du destin de Sara. Le trait élégant et sensible de Cyril Bonin restitue à merveille l’époque (les années 40-50) et le tourbillon de la vie qui entraine les personnages là où ils ne pensaient pas aller.

1945. Sara Smythe est une jeune femme indépendante, proche d'Eric, son frère artiste. Elle travaille dans la presse. Elle tombe amoureuse de Jack même s’il pourrait bien s’agir d'une simple aventure d'un soir. D'autant plus que le lendemain, Jack part en Europe faire la guerre. Mais cette rencontre aura un impact profond sur toute la vie de Sara.

Extrait de La poursuite du bonheur © Cyril Bonin aux éditions Phileas

Le pitch a l'air banal, voire cucul, mais ne vous y trompez pas, vous allez dévorer cette histoire intense, profonde, bien plus complexe qu'elle n'en a l'air. Déjà parce que les personnages sont terriblement attachants (Sara et son frère, bien sûr, mais aussi par exemple un surprenant avocat). Loin d'être monolithiques, on prend plaisir à les découvrir dans leurs forces comme dans leurs petites (ou grandes) lâchetés. La vie est faite de choix, et il n'est pas toujours simple de faire le bon. Surtout quand le maccarthysme empoisonne l'atmosphère. Le frère de Sara va se retrouver pris au piège.

Il s'agit au départ d'un roman de Douglas Kennedy que Cyril Bonin a adapté en BD. Cette histoire était parfaite pour son dessin sensible. L'artiste a su tailler dans le texte copieux pour en faire un nouvel objet. Il en a fait sa chose. Place a été faite pour que les interactions entre les personnages soient au cœur du livre, avec des dialogues qui sonnent juste. Les expressions, la gestuelle sont des clés essentielles pour transmettre les émotions au-delà des mots. Bonin est très fort à ce jeu. Ses couleurs si particulières rendent bien l'ambiance des années 40-50.

Le roman de Douglas Kennedy commence et finit différemment de la BD car l'écrivain y présente Sara âgée, avant un long flashback. L'option retenue par Cyril Bonin de se concentrer sur une période moins longue de la vie de Sara n'en est pas moins émouvante et donne un élan à l'ensemble. Cette lecture est un vrai petit bonheur. Pas si petit, d'ailleurs : 150 pages à dévorer.