En juillet 2017 apparaît une annonce : une certaine Maria d’Apparecida a été retrouvée morte dans son appartement parisien. Sans famille, ni ami, on s’apprête à l’enterrer dans la fosse commune. Une journaliste brézilienne installée sur Paris s’interroge et mène sa propre enquête sur cette femme : une domestique noire devenue cantatrice.
Maria d’Apparecida. C’était son nom. Décédée en juillet 2017 à Paris, cette femme s’apprétait à partir dans le silence le plus total. Mais c’était sans compter sur la curiosité de Mazé Torquato Chotil, une journaliste et auteure brésilienne alors installée à Paris depuis une trentaine d'années. Cette dernière, intriguée par une annonce sur les réseaux sociaux, entreprend l’enquête sur cette inconnue que l’on destine à la fosse commune. La curiosité de Mazé Torquato Chotil va ressusciter le souvenir oublié de Maria d’Apparecida dans la biographie Negroluminosa Voz (paru en 2020). Deux ans plus tard, sa fille, Clara Chotil perpétue cette résurrection dans Opera Negra, sa première bande-dessinée.
Et la vie de Maria d’Apparecida vaut la peine d’être racontée. Domestique noire orpheline du Brésil devenue cantatrice pour jouer Carmen à l’Opéra de Paris… sa vie est une succession de rencontres et d’opportunités choisies. Ses amours, ses peines, ses gloires, ses drames… la success story n’est ici qu’un apparat. Ne vous contentez pas de cet habituel poncif de biopic où une inconnue devient une célébrité avant de retomber dans l’inconnu. Opera Negra ne raconte pas que ça. L’album est une ode à la modestie d’exister. Un rappel sur le devenir et l’humilité d’être. Maria d’Apparecida se voyait comme une ambassadrice du Brésil pour ceux qui aiment la poésie, le chant et la musique tout en se demandant pourquoi la vie l’avait menée à la grande table.

Opera Negra
© Actes Sud, 2022
Le dessin souffle le chaud et le froid…. ou plus exactement, le travail sur la coloration est plus inspiré que le travail sur le trait (très approximatif). En effet, tout le secret visuel de la BD réside dans la distinction de ce qui est coloré et de ce qui ne l’est pas : ce qui est coloré touche Maria dans son histoire et sa personnalité, ce qui ne l’est pas fait figure de bruit de fond. Par cette simple idée de coloration, Clara Chotil réussit à mettre en lumière la personnalité de Maria qui faisait abstraction de certaines choses et pas d’autres. Certaines actualités comme certaines personnes l’atteignaient... mais pas d’autres.
La lecture d’Opera Negra est une œuvre qui rappelle quelque chose de primordial : nous ne sommes que de passage.