La conquête de l’Ouest, ou plutôt la dure vie dans l’Ouest américain au XIXème siècle est le décor de ce récit épique et touchant qui prend certains ingrédients du western pour en faire une recette originale. Avec un rocking chair en prime.
Jean-Philippe Peyraud est un auteur plutôt connu pour ses récits contemporains et urbains traités d’un pinceau élégant, tel Premières chaleurs. Alain Kokor a de son côté touché à différents thèmes de son trait enlevé et dansant. Tous deux n’avaient encore jamais abordé le western, et encore moins ensemble. Le second illustre pourtant ici sur un scénario du premier un récit qu’on apparentera sans hésitation à ce genre, même s’il s’empare de certains de ses mythes uniquement pour les emmener dans des contrées sauvages et nous surprendre.

Rocking chair © Futuropolis, 2022
C’est l’épopée d’un jeune garçon Kees et d’une jeune fille Daatje qui se retrouvent très vite orphelins loin de toute civilisation et qui doivent survivre. Ils n’ont pas le choix. Ils doivent mûrir ou mourir. Le rocking chair fabriqué et joliment décoré par le grand-père du garçon donne son titre au récit. Daatje y tient et Kees ne l’oubliera pas, même s’ils doivent l’abandonner. Cet objet est le lien entre tous les personnages. Et il permet une digression longue d’une cinquantaine de pages au milieu du récit, tantôt muette dans la nature, tantôt dialoguée avec l’apparition de nouveaux protagonistes dont la vie est parfois bien éphémère. Mais qu’on ne s’y trompe pas, les vrais héros du récit restent Kees et Daatje, que nous retrouvons avec plaisir des années plus tard dans la dernière partie de ce livre attachant.
Un vrai souffle d’aventure nous entraîne tout au long des pages. Les auteurs n’hésitent pas à créer la surprise par des ruptures dans le rythme, souvent ponctuées par des événements violents. Le lecteur peut même se dire que parfois les auteurs ont poussé le bouchon un peu loin : « Pourquoi faire mourir XXXX ? », « Pourquoi lui faire quitter YYYY ? » (mais ne dévoilons rien). Cependant, ce récit parfois âpre est aussi profondément empreint d’humanité, et non dénué d’un humour salutaire.
Cette variation sur le western est une jolie réussite.