Juillet 1942, sur le front de l’Est, l’armée nazie essuie en Ukraine des pertes humaines qu’un personnage atypique tente de soulager. Martin est médecin SS, mais avant tout, il se consacre aux autres, tout en vivant une solitude intime et douloureuse, loin des siens.
Pour la petite histoire, en 2015 l’éditeur ARTÈGE BD publiait Herr Doktor, la peste et le choléra. Cette première partie (54 planches) est désormais reprise et complétée de sa suite attendue Septicémie (50 planches). Reprenant le catalogue de l’éditeur précédent, Plein Vent concrétise, grâce à une campagne de financement participatif, le projet de cette intégrale. Le lectorat se réjouit de la poursuite de l’aventure, de la découverte des pages de croquis et d’un prix modique. Après un tirage initial de 3500 exemplaires, une réimpression (+2000 exemplaires) est déjà en cours.
Pris dans les mailles d’un destin capricieux, embarqué contre son gré après avoir été démobilisé côté français en juillet 40, ce « malgré nous » alsacien confie le récit de son destin à son hôtesse. Ainsi, une honteuse capitulation lui avait permis son retour à Strasbourg. L’amertume disparaît lorsque le soldat redevient l’époux présent, le père admiratif de sa fille grandie. Martin et Élisabeth, lui catholique, elle juive et leur petite Solange, six ans déjà.

Martin alias "Herr doktor" © Plein Vent
Mars 1942. Martin envisage son prochain voyage vers Paris lorsqu’un groupe de militaires accompagnant un mourant, pénètre dans son cabinet. Même menacé, le médecin ne peut lutter contre la mort immédiate de ce nazi. Accusé de négligence, il évite cependant l’exécution sommaire en acceptant de s’enrôler en qualité de médecin.
Propulsé aux limites orientales de l’avancée de l’armée allemande en Ukraine, il va sauver des compagnons d’armes, fussent-ils d’abominables salauds.
À Paris, en l’absence de Martin, la rafle du Vél' d’Hiv' a lieu, emportant Élisabeth vers l’inconnu. Solange, la petite, en aura été préservée grâce à Monsieur Oléron, ce gendarme pétainiste pris d’affection pour la famille.

Martin est le témoin des ravages de la seconde guerre mondiale © Plein Vent
L’histoire de Martin et de sa famille fera bientôt écho aux malheurs d’une époque que le style graphique de Régis Denoël porte avec justesse. Il anime avec passion les gestes minimalistes de ses personnages : mains et attitudes des corps parlent autant que les dialogues. Le parti pris du cadrage à hauteur d’homme confère un aspect « classique » à cette bande dessinée. Les couleurs (d’Anna, pour le premier chapitre, de Joël Costes pour le second) s’illuminent avec les paysages des Alpes bavaroises. Sombres, généralement, elles participent à la gravité constante du propos.
Un récit poignant inscrivant Martin Wisenfall, Herr Doktor, dans la grande Histoire. Miracle de la fiction qui se mêle habilement à la réalité.
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