Le maire d'un village des Pyrénées passe l'arme à gauche. Le curé refuse de prononcer les funérailles dans l'église tant que l'argent que le premier magistrat avait pris aux habitants n'a pas été versé pour payer les réparations de l'édifice. La cérémonie se fera donc à mi-chemin. Un vrai bon thriller rural, rugueux et sanguin.
Le chemin de montagne est diablement escarpé. Il va pourtant falloir descendre le corps du maire dans son cercueil jusqu'à mi-pente : le curé du village refuse que les funérailles se déroulent dans l'église communale tant que l'argent pour payer les réparations de l'édifice religieux ne lui a pas été versé. En descendant tant bien que mal le cercueil, les langues des hommes se délient et le vrai visage du maire se dessine.
Voilà le scénario d'un excellent thriller rural. Il réunit tous les ingrédients du genre : la rugosité des gens de montagne, les non-dits campagnards et ce qu'il faut de suspense pour dérouler une narration de qualité, à même d'entraîner le lecteur dans les tréfonds de l'âme. Charogne porte bien son nom et symbolise l'ambiance qui prend place dans ce roman graphique glacial.
Le trait anguleux de Borris fait ton sur ton avec le récit : ils font froid dans le dos. À travers les expressions des personnages au fil d'une histoire chaotique, jaillissent les culpabilités et les silences. Le dessin, maîtrisé et abouti, conduit vers l'inéluctable. Le décor est rapidement planté et l'on sent dès le départ que les accidents de parcours seront légion. Gagné.
C'est le genre de BD qui ramène à la réalité. Charogne raconte les parcours de vie qui se rejoignent. Ce qu'on croyait naïvement savoir sur ceux qui nous entourent en nous trompant. Charogne donne à voir la jalousie, le mensonge, les conséquences du non-dit. Charogne vaut vraiment le détour.
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