Après nous avoir subjugué avec son époustouflant L’Art de voler Antonio Altarriba revient sur un tout autre talent, celui de tuer. Bienvenue dans un album où mort et beauté ne font qu’un.
Rodriguez Ramirez, professeur émérite, a une passion, celle d’ôter la vie. Méthodique, discret et consciencieux jamais un assassin n’aura fait de la mort un tel acte de pur esthétisme. Fidèle à sa vision de l’art, l’artiste-tueur n’accorde aucune place à l’utilité, il tue simplement pour le plaisir de manier la matière la plus précieuse qui soit, la vie.
Férus d’art et psychopathes en devenir trouveront de quoi combler leur passion dans cet album aux multiples aspects. Le choix d’
Antonio Altarriba de nous introduire dans les pensées de son personnage principal permet de mettre en parallèle réflexions esthétiques et vie réelle. Omniprésent, l’art surgit au détour d’une visite au musée ou de congrès et nous est dévoilé dans ses aspects les plus complexes. Imperceptiblement, plongés dans le contexte d’un Pays basque partagé entre désir d’indépendance et refus du terrorisme, l’auteur nous mène vers une réflexion sur la violence et le pouvoir.
Seul le talent de Keko et son dessin efficace pouvaient mettre en valeur un scénario d’une telle richesse. Maître du clair-obscur il nous plonge dans un univers rempli de noirceur que viennent relever de temps à autre quelques touches de rouge vif, symboles d’une mort omniprésente. De Goya jusqu’au body art, l’art est partout, jusque dans les moindres détails. Keko ajoute ainsi au scénario complexité et beauté.
Un scénario soigné, un dessin époustouflant, Antonio Altarriba semble avoir compris comment faire de chacun de ses albums de véritables réussites. Moi, Assassin ne déroge pas à la règle et nous offre un moment de pur bonheur, un bonheur sans aucune utilité si ce n’est d’apprécier la simple beauté d’une œuvre d’art.