Dans La Faille, onzième album de Lady S, la courageuse espionne a rangé les armes et travaille désormais pour une ONG. C’était sans compter sur son ami d’enfance, interné à Guantanamo. Philippe Aymond nous raconte son deuxième album en solo depuis que Jean Van Hamme lui ait passé la main sur cette série d’action.
Lady S, une identité mystérieuse
Comment s’est passée la reprise de la série ?
Philippe Aymond : L’expérience d’un premier album m’a beaucoup aidé, j’ai pu en voir les défauts et m’améliorer. Je trouvais le tome 10 assez « bavard », très concentré sur l’histoire : j’avais mis le dessin de côté, alors que je suis dessinateur ! Avec ce onzième tome, j’ai retrouvé un équilibre avec des dialogues plus concis, plus fluides.
Comment avez-vous élaboré la continuité de Lady S ?
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Jean Van Hamme a créé ce personnage, je l’ai donc pris en cours de route en essayant de l’approfondir. Dans les premiers albums, il y a un flou autour de son identité, puisqu’elle est manipulée par un service secret ! J’ai voulu partir sur de nouvelles bases, donner enfin au personnage la possibilité de faire ce dont elle a envie.
Je me posais sans cesse la question : que va-t-elle faire une fois libre ? Cela m’a aidé à construire le personnage dans ma tête. Bien sûr elle est toujours liée à son passé et aux autres personnages… pas si libre que ça !
Quel âge a aujourd’hui Lady S ?
Bonne question ! Au début de la série elle avait 25 ans environ… là ça fait dix ans que la série existe, mais elle n’a pas vraiment 35 ans. Elle a dû prendre 3 ou 4 ans. Les personnages de bande dessinée ne vieillissent pas aussi vite que les auteurs et les lecteurs !
Qu’est-ce ce qui démarque Lady S des autres espions, type James Bond ?
Tout ! Lady S n’a pas choisi de devenir espionne, elle s’est retrouvée dans des situations impossibles contre son gré. James Bond veut servir sa cause, son pays. Lady S ne s’en fiche pas mais c’est plus compliqué, car quel est son pays finalement ? Il y a l’Estonie où elle est née, les endroits qu’elle a traversés, ensuite elle est devenue américaine, redevenue estonienne et moi je la fais redevenir américaine. Elle est probablement un peu perdue !
C’est pour ça qu’elle travaille dans une ONG, une organisation avec des idéaux qui n’appartient à aucun pays. Parce qu’elle a des idéaux Lady S ! Elle l’a déjà prouvé : par exemple elle tire très bien au pistolet mais ne veut plus toucher une arme à feu. D’ailleurs dans La Faille, elle n’utilise pas son arme et pour le tome suivant, j’ai mis un point d’honneur à écrire un scénario dans lequel aucun coup de feu ne sera tiré !

Les espionnes féminines sont souvent séductrices, stéréotypées. Comment construire son personnage féminin malgré la mythologie James Bond Girl ?
Je me suis beaucoup documenté sur le passé des vraies espionnes. Je ne sais pas si c’est une bonne chose mais c’est vrai que les femmes agissent souvent dans la partie séduction. J’avais notamment lu un truc totalement hallucinant : dans les années 70, le KGB a envoyé des jeunes filles faire les vendanges en France pour les faire trouver un mari français et qu’elles deviennent des « agents dormants » !
Pour ce qui est de l’influence des James Bond girls… Lady S y fait certes un peu penser sur la couverture du tome 11 avec son costume de plongée, un thème récurrent dans James Bond. Quand on traite d’un genre comme l’espionnage, on joue avec ses codes ou alors on en prend carrément le contre-pied, ce qui n’était pas le but ici. Cependant ce côté glamour est au deuxième plan : Shania refuse de tomber là-dedans. Quand Orion lui demande d’aller séduire un trafiquant d’armes, elle n’est pas d’accord ! Et si Lady S doit être défigurée un jour, je continuerai à raconter la série de la même manière.

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