Héros, séducteur et cabotin
Sur ses avions il fait peindre un cercueil, une tête de mort, des candélabres.
Fred Bernard : C’est lui tout craché. Un séducteur direct, mais aussi un cabotin qui agace. Il voulait qu’on le remarque. Son insigne si spécial sur son avion permettait que les Allemands le reconnaissent et l’attaquent. À lui de les descendre et de gagner le combat.

Aseyn : Fred le rend sympathique. On a une bonne opinion de lui et le mystère de sa disparition en 1927 ajoute au mythe. On n’a jamais vraiment su ce qu’était devenu l’Oiseau Blanc. Sans ce crash, on ne se souviendrait pas autant de lui.
Dans votre récit, une femme, sa maîtresse à vie, est la voix off qui raconte, commente.
Fred Bernard : Emilie (le prénom a été changé) était une femme mariée qui ne voulait pas divorcer. Elle a été la compagne de toute la vie de Nungesser, même quand il s’est marié à une riche américaine. Enfin quand Emilie se sépare de son mari, Nungesser ne veut plus se marier. Mais le jour de mai 1927, quand décolle l’Oiseau Blanc, elle est au bord de la piste. Il y avait entre eux un amour fusionnel, d’exception.

Aseyn : J’ai inventé son physique et Fred le prénom mais elle a vraiment existé. On n’a pas de photo. Je l’ai faite brune aux cheveux longs, belle et subtile, passionnée. J’ai adouci le dessin d’un autre personnage important, le père de Nungesser dont la photo était sévère. Nungesser a voulu toute sa vie que son père soit fier de lui, ce qui explique la surenchère dangereuse de ses exploits guerriers, entre autres.
Comment avez-vous travaillé sur cet album dont le dessin, la mise en page fait penser à la presse des années vingt ?
Aseyn : J’ai tout fait en numérique afin d’avoir une homogénéité de trait, une efficacité et de la rapidité. Sur papier on dessine, sur ordinateur on fait de belles images. Je me suis aussi effectivement inspiré de la mise en page de journaux comme l’Excelsior et des premières éditions du New York Times, avec des incrustations. Et le noir et blanc accentue le rendu presse de l’époque.

Fred Bernard : On a pensé à la couleur mais on a validé le noir et blanc.
Finalement vous faites de Nungesser un héros auquel on s’attache, à la fin digne d’une tragédie antique ?
Fred Bernard : Si c’est le cas tant mieux. Nungesser est un romantique. La guerre est tombée à pic pour lui et après, il lui a fallu quelque chose d’encore plus fort. Si on pleure à la fin quand son avion disparaît dans les nuages, j’ai atteint le degré d’émotion que m’a inspiré le personnage. Nungesser a fait de sa vie une légende.

Aseyn : Nungesser fait partie de l’héroïsme imaginaire collectif. J’ai une bonne opinion de lui. Un type d’un grand courage qui a un charisme rare.
Après ce dernier vol de Nungesser quels sont vos projets ?
Fred Bernard : Revenir à Jeanne Picquigny qui fait un passage dans Nungesser, une suite de la Patience du Tigre. Et un album sur les veuves et mères de soldats morts pendant le premier conflit mondial chez Delcourt.

Aseyn : Je ne ferai plus de BD d’époque. Cela demande un gros effort intellectuel de penser au passé. Par contre pourquoi pas retravailler avec Fred ?
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