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Identité : déraciné

Après cinq ans d'attente et une adaptation en film, Jung a clos l'an dernier sa trilogie Couleur de peau : miel. Ce Coréen adopté en Belgique, fan du Japon et délocalisé en France, y évoque son enfance, mais aussi le déracinement de milliers de Coréens. Rencontre avec un auteur aux cultures multiples.

En quête d’origines

Extrait de la bande dessinée

Extrait de la bande dessinée

Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

Jung : Je viens de Corée du Sud et j'ai été adopté par une famille belge quand j'avais cinq ans. J'ai commencé à griffonner dans mes cahiers d'école, puis le dessin est devenu un besoin presque organique, pour pouvoir exprimer mon intériorité. J'ai commencé à dessiner parce que j'avais envie de raconter des histoires.

Un jour j'ai frappé à la porte de Spirou et j'y ai publié mes premières pages. J'ai commencé très vite à en vivre. Déjà à ce moment-là, j'abordais des thématiques comme l'identité, la recherche des origines... Puis un jour, je me suis vraiment demandé pourquoi je faisais de la bande dessinée. Je me suis souvenu que petit, je voulais raconter un certain type d'histoire. En commençant Couleur de peau : miel, je suis revenu à ce que je voulais faire au départ. En terme de graphisme, je me suis libéré de toutes les contraintes techniques que j'ai eues sur mes autres albums.

Dans Couleur de peau : miel, votre dessin est effectivement très différent de vos précédentes BD. Comment s'est opéré ce changement ?

 

Tous mes autres albums sont très techniques. Dans Kwaïdan, qui est en couleur directe, je voulais montrer que j'étais capable de faire des belles planches. Je me suis bien amusé sur le premier tome, qui est très bien, beaucoup moins sur les deux suivants. Ça se ressent : ils sont moins réussis, à tous les niveaux.

Extrait de la bande dessinée

Extrait de la bande dessinée

J'ai voulu arrêter d'être dans la démonstration d'un savoir-faire technique. J'ai envie de faire des bouquins peut-être moins extraordinaires graphiquement, mais dont le dessin est beaucoup plus narratif. Je veux que mes personnages aient une existence. Avant j'avais un trait plutôt lisse. Dans Couleur de peau : miel c'est un trait accidenté, de l'ordre du croquis, sur lequel je pose du lavis, de l'encre de chine diluée. J'aime beaucoup ça parce que ça évoque les estampes asiatiques.


Dans cette BD, vous racontez la vie avec votre famille d'adoption sans détours. Vous n'avez pas eu peur de la réaction de vos proches ?

 
Je n'y pensais pas. Je suis un peu kamikaze ! J'ai fait le choix de raconter les choses avec sincérité, en n'épargnant personne. Je me suis dit : « Si je demande leur autorisation, ils diront non. Donc j'y vais et j'assumerai après ». Il y a des choses que je raconte de manière très crue. J'ai pris un risque effectivement, autant dans la BD que dans le film, qui sont très bien reçus par ma famille. Je pense qu'ils sont suffisamment ouverts d'esprit.

Au début, je montre que ma mère était très dure, mais ensuite elle est réhabilitée. Il y a une progression. Ce n'est pas une autobiographie dans laquelle je règle mes comptes. Ce n'est pas mon histoire personnelle qui est intéressante, mais les thématiques que j'aborde : le vide laissé par l'abandon, comment on se reconstitue... Je suis quelqu'un de profondément optimiste, donc c'est une histoire que j'ai voulu positive.

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