Shin Zero - T1

Tout en respectant les codes du genre, Mathieu Bablet et Guillaume Singelin proposent avec Shin zéro une réécriture moderne des aventures de sentai Bioman, Power Rangers. Une des meilleures découvertes de cette année.

En 2008, cela fait 20 ans que le dernier kaiju (monstre géant venu des mers) a été vaincu par les sentai, des justiciers en combinaison moulante monochrome. La menace a disparu des consciences et le programme Sentai, autrefois géré par l’État, a été racheté par une compagnie privée. Véritable « uberisation des super-héros ». Désormais, ce sont des étudiants fauchés qui endossent le costume de sentai pour réaliser des missions d’ordre publique, allant de la surveillance de magasin au démantèlement d’ateliers mafieux. Le tout pour être payé une misère et noté sur 5 étoiles. Héloïse, Warren, Satoshi, Nikki et Sofia se retrouvent ainsi sentai. Par esprit de transgression, par amour ou par désir de rendre le monde un peu meilleur… chacun d’eux à des motivations bien différentes mais ils se retrouvent tous dans le même escadron, entre amitié, amour et rivalité…

Extrait d'une planche de Shin Zéro T.1 © Rue de Sèvres

Teenage Mutant Ninja Sentai

Mathieu Bablet (Carbone et Silicium, Shangri-La) scénarise Shin zéro, trilogie de « mangas agrandis », de deux cents pages chacun, au format souple. Il nous propulse dans un univers nostalgique, aux portables à clapet façon année 2000 où l’héroïsme s’achète et les super-héros du passé ne sont pas reconnus pour leurs services (à la Watchmen, Les Indestructibles…). Quelle bonne idée que cette réappropriation du genre sentai !

Plein de profondeur et d’ambivalences, chacun des héros a une personnalité forte, des enjeux à plusieurs niveaux et une place de premier plan dans le récit. Ainsi, Mathieu Bablet aborde des sujets difficiles : devenir un adulte, s’émanciper en tant que femme, subvenir à ses besoins... Vivant en colocation, les personnages ne cessent d’interagir, construisant une ramification de relations (notamment un double triangle amoureux) qui promettent de belles évolutions au fil de la série.

Y2K nostalgia

Guillaume Singelin (Frontier) et son trait, nourri d’influences internationales, donnent vie à cet univers nostalgique. Tout est en noir et blanc à l’exception des costumes des sentai. Les cases fourmillent de détails et le découpage est une leçon de narration. Lisez Shin zéro !

Article publié dans le Mag ZOO N°102 Janvier-Février 2025