Seul, à errer dans ce paysage désolé, Karl se demande s’il y a d’autres survivants qui, comme lui, ont pu résister au mystérieux virus qui a décimé la population. Ambiance post-apocalyptique pour ce nouvel album de Winshluss, qui négocie un retour à la BD plus sombre et plus tendu !
Cinq ans et un film plus tard, Winshluss revient avec cet album qui surprend par son côté résolument ancré dans l’actualité, inquiétant et presque désillusionné. Nous plongeons dans un monde frappé par une étrange pandémie, dans les pas d’un homme qui semble avoir perdu la mémoire, qui survit en chassant, en fouillant les maisons qu’il trouve sur son chemin, dans ce paysage jonché de cadavres. Il se souvient simplement s’être réveillé, dans une fosse commune, un bracelet d’hôpital au poignet ou était inscrit le nom de Karl.
Le récit commence donc par une quarantaine de pages muettes, en noir et blanc majoritairement, ou l’on découvre le quotidien de ce voyageur solitaire. Winshluss installe ainsi le cadre, insiste sur l’aspect survivaliste du personnage et sur la dimension désespérée de cette existence sans horizon. L’écriture est sèche et linéaire, à peine ponctuée par quelques illustrations en couleur où l’on retrouve momentanément ce goût de l’hétérogénéité propre à l’artiste curieux et audacieux !

Karl a pour seuls bagages un sac à dos et un fusil
© Gallimard
Soudain, à l’occasion d’une rencontre assez macabre avec un mort tout desséché, Karl se confie et revient en arrière sur ses premiers pas dans l’apocalypse, en pleine ville, surpris par la situation, par l’ampleur du désastre ! Le temps passe et il finit par rencontrer d’autres survivants, une communauté qui l’accueille à bras ouvert, ce qui provoque en lui un retour de mémoire fulgurant…
Nous sommes loin des récits précédents, ponctués d'humour, avec un petit côté délicieusement absurde. Cette fois, nous glissons dans une atmosphère résolument plus dramatique dont les contours restent assez flous. Ce qui est important, c'est le parcours du personnage lui-même, plus que le cadre ou d’hypothétiques explications. Winshluss construit son histoire à rebours, sans trop s’étendre sur les détails, cela renforce cette inquiétude qui enfle progressivement, au fil des pages !

Karl se bat pour survivre
© Gallimard
Malgré tout, il reste dans un traitement assez classique du thème, n'optant pas réellement pour l’originalité ! Et même si graphiquement, cet album peut sembler moins «fou-fou», il propose tout de même quelques digressions graphiques assez intéressantes qui nous montrent qu'il reste très inspiré et inventif.
Un album de remise en bouche, moins léger, mais où l’on retrouve cette personnalité hors norme. Peut-être plus pour les fans irréductibles !