Cette semaine, la Toile montante vous fait explorer l’art engagé de Justine Sarlat. Portrait de cette blogueuse expatriée en terres flamandes, qui invoque avec brio la bande dessinée pour éradiquer l’injustice.
Une BD à fleur de peau
Adolescente, Justine rencontre son premier coup de foudre artistique dans les shojos d’Ai Yazawa et du collectif Clamp : « J’ai versé des hectolitres de larmes sur ces bouquins ! » confie-t-elle. En plus des premiers émois amoureux, la force sentimentale contenue dans ces mangas révèle à la jeune fille le potentiel de la bande dessinée, sans pour autant l’inciter à en faire un métier : « Au départ, je voulais faire de l’animation, mais réaliser un projet demande beaucoup de temps et malheureusement : je suis une grande impatiente !

Si Justine Sarlat était un animal, elle serait une salamandre ; si elle devait prendre un modèle, elle choisirait les héros de sa prochaine BD !
Heureusement, ce long travail se diluait face au plaisir qu’elle prenait à scénariser et à réaliser des story-boards. Un premier workshop avec ses camarades d’Angoulême lui fait l’effet d’un électrochoc et la décide à rejoindre les cours d’illustration de Sint-Lucas en Flandres. Tantôt à la peinture, tantôt avec un crayonné fulgurant, Justine crée un style qui la démarque de ses confrères de Tumblr. D’abord lancé pour qu’une amie voie son travail à longue distance, son blog permet aux internautes de découvrir le charme de ses récits de vie.
Un regard acéré
Sur son blog, Justine s’amuse à décortiquer les petits riens qui grouillent dans la vie quotidienne : « J’aime bien observer les choses qui se passent autour de moi, aussi bien dans le réel que dans le virtuel. » approfondit-elle « Je fais beaucoup attention à mes ressentis, et m’efforce continuellement à en chercher la source ! » Ces instants d’introspection deviennent la trame d’Apnea, Anonyms ou Waking up Next to the Wrong Queen, des histoires où humains se rencontrent dans des dialogues bien ficelés.

Extrait de Waking Up Next to the Wrong Queen
Portée par le génie de Joanna Hellgren ou Marjane Satrapi, la plume de Justine œuvre chaque jour à décrypter le large panel des interactions humaines. Les rapports qui la fascinent le plus ? « Les relations de pouvoir » car elle « trouve très dur de retranscrire cette emprise qu’exercent certaines personnes ou groupes, que ce soit des rapports humiliants ou de fascination ! » En plus de donner matière à ses BD, les rouages complexes de l’humain dissimulent sa ferveur militante...
Le dessin comme arme
L’activisme chevronné de Justine ne freine jamais devant ses créations, bien au contraire... « Mon engagement est mon moteur, il me donne l’impulsion pour commencer mes histoires. » affirme-t-elle. Aucun sujet de société n’échappe à l’œil critique de la jeune femme, à part ceux qui l’ennuient. Mais rien n’exalte mieux son imagination que sa lutte acharnée contre le sexisme quotidien.

Si Justine Sarlat était une oeuvre, elle serait l'album The Julie Ruin de Kathleen Hanna ; un souvenir, un rêve où elle se muait en une créature d'eau !
Féministe dans l’âme, elle déclare la guerre aux représentations stéréotypées dans le franco-belge ainsi qu’à la vision binaire du genre : « Ces choses sont très visibles pour beaucoup de monde, et invisibles pour d’autres. C’est pour ça que je tiens vraiment à les montrer. » explique-t-elle. Ce combat, l’artiste le mène sans relâche grâce aux richesses du web. La toile a donné à son talent suffisamment d’élan pour prendre son envol, à travers des publications régulières sur son blog, mais aussi dans la revue Tieten met haar en attendant l’édition de son prochain roman graphique intitulé Braids. Avec tous ces projets sur les rails, la blogueuse invétérée a de quoi renouer avec son premier amour : la BD papier.

Avant rendre visite à Justine Sarlat dans son atelier itinérant, allez sur son blog !
1

0