À chacun son rêve…
L’album s’ouvre sur toutes les histoires que vous ne narrerez pas : pourquoi avoir intégré ce clin d’œil ?
Frank Le Gall : Ah, il y a deux raisons à ça : d'abord, dans la première version, constituée d'histoires courtes, la première case de chaque récit racontait une petite histoire n'ayant rien à voir avec Saïd et Zakia. Ce découpage permettait de montrer la quantité de choses étonnantes qui se passait dans le monde, tandis que Saïd, lui, était contraint de garder le troupeau de chèvres de son grand-père.

Ces petits contes nous plaisaient à tous les deux et, quand j'ai retravaillé le scénario pour en faire une histoire longue, j'ai eu envie de les garder en les réunissant sur la première page. Puis, pour ne pas en faire qu’une simple introduction surprenante mais gratuite, je me suis appliqué à semer dans l'histoire les éléments évoqués dans cette première page : une étoile, un savant, un pirate, un géant...
Ce conte met en scène les rêves, la destinée et finalement l’amour filial, comment ces fils se sont-ils entremêlés ?
Frank Le Gall : Le rêve, les rêves, tiennent une part importante dans toutes mes histoires. J'ai parfois l'impression que la vie n'est qu'un rêve que nous faisons... La destinée et l'amour filial sont également de mes thèmes majeurs, autour desquels Théodore Poussin est entièrement bâti. Mais Là où vont les fourmis m'a permis de développer d'autres thèmes que je n'avais pas eu l'occasion d'aborder, comme ce rapport étrange entre le rêve et la réalité : ici, le rêve précède à chaque fois l'action et prédit ce qui va venir à la façon d'un oracle. La magie est également une des choses que j'avais peu explorées. Ensuite, comment ces fils parviennent-ils à s'entremêler ? J'avoue que ça reste un mystère, même pour moi.

Le récit finit sur l’espoir d’un bonheur simple taillé sur mesure pour chacun. Pour qui avez-vous composé ce conte ?
Frank Le Gall : J’aime beaucoup votre définition d'un « bonheur simple taillé sur mesure pour chacun » qui correspond sûrement à ma vision de la vie. L'espoir, ou la recherche de ce bonheur me semble juste dans sa simplicité.
Mais à dire vrai, je n'ai pensé à personne en particulier en écrivant ce livre. Je ne le fais jamais. Comme chaque auteur, je crois, j'écris d'abord pour moi. Par expérience, je sais que lorsqu'on a pris beaucoup de plaisir à écrire et qu'on est satisfait du résultat, nos histoires ont alors une chance de plaire à d'autres personnes. Il me semble même que « viser un public » tend à limiter nos propos et les appauvrir.

Michel Plessix : Comme Frank, dans tous mes travaux, je ne pense au lecteur qu'en ce qui concerne la narration, essayant que celle-ci soit la plus fluide possible. Après, concernant le choix d'histoires et de personnages, je m'adresse avant tout à moi-même, avec toutes mes couches d'âges... et il commence à y en avoir un paquet !
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