Pourquoi les dieux fabriquent des choses ?
Que représentent pour vous le Dieu-Oiseau et ses corbeaux ?
Ils ne représentent pas la Trinité, mais je pense que c’est à cause de cette référence qu’ils sont trois. Ils sont avant tout une famille. A la manière des dieux grecs, il sont assez humains : ils tombent amoureux, ils parlent aux humains, ils démarrent des guerres. Je voulais mettre en scène ce type de divinités plutôt que la représentation sans visage, et finalement presque abstraite, d’une religion monothéiste. On peut se sentir liés à eux. Je voulais qu’il soit clair qu’ils ne sont pas humains mais qu’ils se conduisent comme leur création.

Ils créent d’ailleurs le monde parce qu’ils s’ennuient…
Oui c’est vrai. Je me suis demandé ce que ferait un dieu. Je pense qu’il créerait des choses pour les mêmes raisons que nous, pas tant parce qu’il s'ennuie mais parce qu’il y a un instinct de création. Je ne vois pas pourquoi un dieu en serait dépourvu !
Comment avez-vous créé ce personnage du conteur ?
Il est paradoxalement l’un des personnages les moins développés. Je dirais qu’il n’est pas basé sur une personne en particulier, contrairement à d’autres personnages. Mais c’est volontaire, je ne voulais pas lui donner une personnalité trop forte parce que son rôle est en quelque sorte de refléter les personnalités des histoires qu’il raconte.

Avez-vous quelques exemples de personnages basés sur des personnes de votre connaissance ?
Le Grand Dag, c’est ma grande soeur ! [rires]
Cette histoire entre les Dags et les Hals est-elle une sorte de parabole d’Abel et Cain ?
Oui effectivement. Il y a beaucoup d'histoires sur les relations entre frères (et soeurs !) dans la mythologie. C’est l’un des thèmes les plus universels au monde, et il y a une raison à cela. En réalité c’est une histoire, à la fois passionnante et bizarre, qui peut amener chacun à s’interroger sur ces relations et sur sa propre dualité.

On ressent malgré tout une portée humoristique dans ces histoires…
Tout à fait ! Je n’y pensais pas particulièrement au début, mais rapidement, ces petites touches d’humour se sont imposées à moi, surtout dans les dialogues entre personnages. Je ne voulais pas qu’ils soient trop dignes, trop retenus dans l’expression de ce qui les rend humains !
Comment avez-vous travaillé l’aspect graphique de cet album ?
J’aime travailler avec une palette de couleurs limitée et évidemment en noir et blanc. Je voulais aussi changer la couleur dominante en fonction de l’endroit où se trouvent les personnages. Ainsi, les pôles sont glacés et bleus avec une lumière jaune clair délavée. La ville est orange et rouge et les régions britanniques sont grises, bleues et rouges. Je voulais que la couleur donne en quelque sorte l’humeur, l’ambiance de l’endroit. En termes visuels, j’aime beaucoup la peinture médiévale et les manuscrits enluminés dont je voulais reproduire le ressenti.
Quels projets pour l’avenir ?
Je travaille actuellement sur une deuxième bande dessinée, qui devrait sortir courant 2016. Ce n’est pas une suite à L’Encyclopédie des débuts de la Terre, mais elle se situe dans le même univers, vous devriez retrouver quelques visages familiers. Mais je pense que c’est un livre qui offrira un ressenti très différent à la lecture. Beaucoup d'histoires seront basées sur des légendes du petit peuple britanniques, au ton plus sombre. Mais les dieux-oiseaux seront toujours là ! Et j’espère qu’il sera traduit en français !

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