Mélangez Tarantino, beaucoup d’humour et un sacré sens de la répartie, vous obtiendrez John Tiffany. Stephen Desberg et Dan Panosian nous décryptent leur recette détonante…
Comment est né John Tiffany ?
Stephen Desberg : J’ai fait ces dernières années des choses très sérieuses, comme I.R.$. Je trouvais dommage que l’on ne puisse pas faire ce genre de BD en ayant de l’humour. J’avais tellement envie d’écrire une histoire avec ce ton là que j’avais déjà écrit deux tomes sans savoir qui allait les dessiner.
C’est Antoine Maurel, éditeur du Lombard, qui a rencontré Dan à New York et lui a parlé de mon histoire. Dan connaissait déjà mon travail parce qu’il est un fan de Marini. Je suis allé le voir à Los Angeles, on a fait connaissance et… comme il n’est pas trop méchant, on s’est plutôt bien entendus [rires].
Comment sont nés ces personnages, forts en gueule ?
Stephen Desberg : S’il y a beaucoup d’action dans la série, c’est surtout pour donner du rythme. J’ai écrit John Tiffany pour explorer les rapports entre les personnages qui ont des idées très différentes. Ça permet des dialogues amusants ! Par exemple, Dorothy est limite extrême droite et John, qui n’est pas du tout de cette opinion-là, a besoin d’elle : il doit donc jongler avec ses opinions…
Dan Panosian : J’ai tout de suite senti le personnage de John Tiffany, c’était le plus facile à créer pour moi. Pour les autres, c’était un peu plus compliqué, mais la manière dont Stephen a écrit le scénario m’a beaucoup facilité la tâche.
Stephen Desberg : Pour Lovejoy par exemple, il m’a envoyé au moins 10 têtes de personnages et je pouvais choisir celui que je voulais !
Ces personnages aux idées plus ou moins douteuses, c’est une manière de revenir sur l’actualité ?
Stephen Desberg : C’est plutôt ma vision sur ce qui se passe dans le monde. Dans ce tome, ils attrapent des terroristes, plus tard, il y aura sûrement des histoires avec des barons de la drogue mais ce n’est pas une série faite pour coller à l’actualité.
Quand je reviens sur un fait, par exemple l’histoire où Dorothy raconte qu’elle a participé à la torture de prisonniers en Irak, c’est pour situer le personnage. Cela permet de rire des choses et de pousser leur côté absurde. De même quand Lovejoy donne sa vision de la société américaine ! Il soutient que les protestants, s’ils sont riches c’est bien, car c’est qu’ils ont Dieu de leur côté, donc que Tiffany n’est pas forcément mauvais puisqu’il fait tourner le système. Je m’amuse de ces raisonnements car je donne un peu mon opinion, mais je l’exprime d’une manière qui ne va pas vexer grand monde…
Le casting digne d’une série ou d’un film américain, c’est aussi un moyen d’en rire ?
Stephen Desberg : C’était un clin d’œil aux séries américaines qui doivent toujours être représentatives de la diversité de la société. J’ai pris plaisir à détourner les codes notamment avec l’asiatique qui veut se marier avec une juive. Il se retrouve à suivre des cours et a des discussions théologiques avec le pasteur où il ne comprend rien du tout…
I.R.$, Le Scorpion, Cassio, comment gère-t-on une production aussi dense ?
Stephen Desberg : Je tiens compte du rythme des dessinateurs, mais quand je travaille sur un projet, je m’y consacre entièrement. Là par exemple, je suis en train de travailler sur le tome 11 du Scorpion. Alors évidemment, j’accompagne Dan sur le deuxième tome de John Tiffany, mais je ne suis pas en train de réfléchir à un autre scénario. Je n’ai pas d’agenda où j’écris « cette semaine = cette série », tout cela se met en place de manière intuitive...
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